Spéciale élections américaines
A l’issue de cette campagne américaine qui voit s’affronter le président sortant Barack Obama et le candidat républicain Mitt Romney. En ce jour d’Election Day, Ghyslaine Pierrat nous livre son point de vue de conseiller en communication politique sur ces élections présidentielles américaines.
Nathanaël Ramos: On a assisté à une escalade des dépenses dans cette campagne avec les PAC, les groupes d’intérêt, et les « 527 committees ». On parle du chiffre astronomique de $5,803,829,964.Comment expliquez-vous cette frénésie dépensière ?
Ghyslaine Pierrat: Les campagnes publicitaires américaines ont toujours été très lourdes en dépenses. En cette année 2012, la Cour Suprême a autorisé les « Super pacs » qui ont permis des dépenses illimitées considérables. Le propriétaire des casinos Sheldon, Sheldon Adelson a donné des sommes à Mitt Romney, qui resteront dans toutes les mémoires des livres de communication politique. La valse permanente et quotidienne des spots politiques à tonalité négative impose cet engrenage. Les spots sont très chers, les sondages sont permanents et onéreux. Les réseaux sociaux représentent également une armée de trackers, d’informaticiens, d’as des claviers, ils sont aussi comptabilisés… Tout est démesuré parce que les Etats Unis c’est 50 états. L’élection Présidentielle américaine aura couté des milliers de dollars, (nous saurons le chiffre exacte d’ici quelques jours), quand en France, elle est plafonnée à 17 et 23 pour les 2 tours, soit 40 millions d’Euros.
Nathanaël Ramos: La campagne fut longue entre deux hommes que tout oppose ce fut d’abord une bataille d’image. Quelle est votre sentiment là-dessus ? D’après-vous qui l’a remporté ? Et pourquoi ?
Ghyslaine Pierrat: C’est une guerre de communication et une guerre d’image, incontestablement.
La communication a été déterminante. Elle a changé de dimension.
Le non verbal très utilisé par Romney a été très efficace au 1er débat, sourires bienveillants, airs compassionnels à l’endroit d’Obama, calme et self control ont été travaillés autour d’une centaine d’entraînement pour Romney pour le 1er débat. Son non verbal, sa gestuelle ont été utilisés comme outils stratégiques, selon les enseignements de l’école de Palo Alto en Californie que j’affectionne particulièrement aussi. Romney a été très bon sur la forme et la communication et notamment au premier débat. Obama a été meilleur à la fin et absent au premier débat. Obama n’a pas démérité ensuite endossant tous les rôles de candidat au chef suprême pour Sandy et Président responsable en actions. Ce sont deux excellents candidats et c’est pour cela que les prévisions sont aussi serrées, jusqu’au dernier moment.
Nathanaël Ramos: Le rôle des épouses à été très important. Quelle est l’influence cela représente t-il sur l’électorat féminin ?
Ghyslaine Pierrat: Dans mon ouvrage, « La communication n’est pas un jeu », j’ai souligné, à dessein, le rôle des épouses que je considère majeur. Ici aux USA, pour l’élection, il a été très important pas seulement pour humaniser le candidat mais pour sensibiliser l’électorat féminin. Michelle Obama rayonnante d’intelligence situationnelle et de générosité a été parfaite dans son rôle de first lady, ni trop, ni pas assez. Anne Romney, après avoir vaincu la maladie d’une sclérose en plaques et un cancer, a été étonnante de dynamisme. Son langage corporel vis-à-vis de Mitt Romney était toujours très tendre et affectueux. Ce permettait à Romney d’être plus chaleureux, lui qui a tendance à être raide et rigide dans son langage corporel.
Leur discours ont été réglés par les « spin doctor » mais chacun connaît que ces 2 femmes. Elles ont une personnalité réelle et un indice respectif de popularité très important. 66 % d’opinions positives pour Michelle Obama !
Nathanaël Ramos: Pour ce qui est de convaincre les votants les analystes du Washington Post et du New-York Times affirment que les démocrates avoir une longueur d’avance sur les Républicains, comment expliquez-vous cela ?
Ghyslaine Pierrat: Franchement, cette élection est passionnante, encore plus passionnante en 2012, parce qu’elle et incertaine ! On n’en sait rien. Il y a des événements imprévus.
Sandy a arrêté l’élan de la dynamique de campagne de Romney et elle repart aujourd’hui. Barack Obama a été étonnant en commandant suprême pour la crise climatique de Sandy, anticipant et surtout ayant un vrai sang froid. Il a montré ce que c’est qu’un grand dirigeant responsable, aux USA et a été particulièrement opérationnel en temps réel…
Il est toujours utile de convaincre d’aller voter parce que l’histoire nous oblige. Les analystes ont en fait eu fort à faire pour cette élection.
Nathanaël Ramos: Pensez-vous que pour les prochaines élections locales en France on fasse appel à des techniques de data mining ou à des spin doctors de façon aussi prépondérante ?
Ghyslaine Pierrat: Oui, j’en suis convaincue. Oui, nous serons, nous, les spin doctors, contactés et sollicités en permanence. Les dirigeants politiques et économiques ont intérêt à comprendre que nous sommes dans un monde de transparence informationnelle qui impose de nouvelles organisations. Ils ont besoin de « body gard communicationnels ». Ce n’est jamais un luxe mais une nécessité. Il n’y a pas de petits et de grands niveaux. Il n’ya pas de petites ou de grandes élections. Elles sont toutes importantes ; nous faisons à chaque fois du sur mesure…
Nathanaël Ramos: Cela risque de donner des idées aux futurs candidats, quel est le budget moyen pour s’adjoindre les services d’un soin doctor ?
Ghyslaine Pierrat: Les moyens sont toujours très variables. Les législations sont très différentes d’un pays à l’autre.
En France, il y a des montants alloués pour les campagnes très précis.
Ghyslaine Pierrat est docteur en communication politique et économique. Elle est « spin doctor à la française » et conseille hommes politiques et industriels. Elle est l’auteur de La communication n’est pas un jeu ( L’Harmattan).
Ghyslaine se distingue par un parcours en cabinet ministériel, au Ministère de la Justice, au Ministère de l’Economie solidaire, au Ministère des finances, à Bercy, au Ministère de la Ville et à la Délégation interministérielle de la ville et au Secrétariat d’Etat au tourisme, à la consommation, à l’artisanat et aux professions libérales, tantôt au Parlement. En deuxième lieu, elle a collaboré auprès de nombreux parlementaires et se singularise aujourd’hui par un réseau relationnel très étoffé, à l’Assemblée Nationale, au Sénat et au Parlement européen.
Vous pouvez consulter le site Internet de Ghyslaine Pierrat et la suivre sur son compte Twitter où elle tweet en direct l’évolution de la campagne américaine.
Pour voir un extrait de l’émission RFI où Ghyslaine Pierrat a participé, cliqué sur le lien ci-après:
http://www.dailymotion.com/video/xux0ud_rfi-speciale-presidentielle-americaine-partie-1_news